« Passons un seul jour avec autant de mûre réflexion que la nature. », H. D. Thoreau, 1854, « Walden ou la vie dans les bois »
Avec cette nouvelle ère caractérisée par les effets de l’activité humaine sur la planète, tout bascule en moins de deux siècles avec une rapidité sans équivalent. Le réchauffement est global, la biodiversité s’érode, des espèces s’éteignent, les océans sont plus acides, les eaux, le sol, l’air, pollués. Et toutes les sphères de l’activité humaine sont en crise : on se divise, on se replie au lieu d’être solidaire. Puis une pandémie mondiale éclate en 2019. L’agent pathogène est l’humain lui-même. Nous avons affirmé notre différence avec la nature, nous nous en sommes écartés pour nous en rendre maîtres et possesseurs (R. Descartes, Discours de la méthode, 1637), pour l’instrumentaliser et la financiariser. Maintenant, le paradoxe est qu’on ne contrôle plus rien. Ce n’est pas toute l’humanité qui est à l’origine de ce désastre mais le développement d’un capitalisme marchand, effréné, l’effet désinvolte des plus puissants de la planète qui exsanguent la Terre.
Depuis plus de trente ans, parcours de vie et parcours artistique s'entremêlent en toute évidence. Ma recherche théorique et plastique se veut être un éloge à la lenteur, à la contemplation pour résister à l’emballement de la société. Elle questionne nos valeurs humanistes oubliées et les liens que l’on pourrait à nouveau tisser avec le vivant, en agissant avec et pour la nature.
Vous allez découvrir un travail donnant à voir notre rapport distancié à cette nature et tous les effets qu’ils engendrent. Mais aussi ce nouveau récit que l’Anthropocène nous force à réinventer afin que l’on retrouve notre place, en nous demandant tout simplement ce qui relève du superflu ou de l’essentiel.
Ce jeu d’équilibriste entre une humanité au bord de l’abîme et l’espoir d’une symbiose avec la nature en vaut la peine car la beauté du monde est encore là, même si elle est sévèrement menacée.
Je ne peux terminer sans citer Edgar Morin, philosophe-sociologue, je me définis tout comme lui comme optipessimiste, parce que, même si la mauvaise nouvelle est que tout va mal en ce monde, la bonne est que tout est à faire. L’art et son public peuvent déjà y contribuer, en retournant la crainte en souci collectif.
Merci beaucoup d’être en ce lieu et excellente balade au coeur du Vivant.
Emmanuelle Cascail